Digbeu Cravate, Willy Dumbo, Michel Gohou… les humoristes ivoiriens dans la lumière

Digbeu Cravate, Willy Dumbo, Michel Gohou… les humoristes ivoiriens dans la lumière

Quatre ans après « Bienvenue au Gondwana », Michel Gohou, Digbeu Cravate et Willy Dumbo font le point sur l’évolution de la place de l’humoriste en Afrique

De gauche à droite, les comédiens ivoiriens Digbeu Cravate, de son vrai nom Michel Bla, et Michel Gohou. © Vincent Fournier/JA

« Abidjan ? C’est le siège du rire ! » s’exclame l’humoriste ivoirien Willy Dumbo à l’heure de l’apéro. En guise de preuve, le festival Coming to Côte d’Ivoire, qui s’est tenu du 12 au 14 août, et qui a ouvert ses portes avec une scène dédiée aux comiques locaux.

L’HUMOUR, C’EST PLUS LÉGER !

En 2017, deux monuments du rire ivoirien, Michel Gohou et Digbeu Cravate, têtes d’affiche de Bienvenue au Gondwana, racontaient à Jeune Afrique les dessous du film réalisé par Mamane qui, pensaient-ils, allait aider à populariser les comiques sur le continent. Qu’en est-il aujourd’hui ? Les deux artistes répondent à la question quatre ans plus tard.

Scène partagée

Pour Digbeu Cravate, le changement d’état d’esprit à l’égard des humoristes a bien eu lieu, comme espéré. « On jouit de davantage d’égards. On a compris qu’on devait relever le défi de valoriser la culture africaine et que cela passait par le fait de montrer que le continent est multiculturel », commence-t-il. Gohou rebondit : « Avant, pour permettre aux gens de décompresser, c’était la musique, la musique, encore la musique… Mais déplacer un orchestre coûte cher. L’humour, c’est plus léger ! »

L’HOMME QUI RIT BEAUCOUP SE SOIGNE DEUX FOIS

Tous deux s’accordent sur le fait que l’humoriste est au centre de beaucoup de mouvements sociétaux, qu’il est un canal utile à exploiter, y compris par les politiques. Et qu’en quatre ans, beaucoup de chemin a été parcouru à ce niveau.

« Les humoristes ont le pouvoir de véhiculer des messages, de faire de la sensibilisation, d’amener les gens à voir les choses autrement », renchérit Digbeu. « L’homme qui rit beaucoup se soigne deux fois », intervient Gohou, qui voit dans le rire un soin tant psychologique que physique. « C’est une forme de thérapie qui ne dit pas son nom », conclut-il.

L’ÉTAT ACCEPTE D’ÊTRE CRITIQUÉ, ET C’EST INTÉRESSANT

S’il fallait illustrer la façon dont l’humour s’est imposé, tant dans le pays que sur le continent ? Tous deux répondent qu’avant, les humoristes n’étaient pas sollicités pour des manifestations comme Coming to Côte d’Ivoire mais que, aujourd’hui, plus un seul événement n’a lieu sans que l’on fasse appel à eux.

Ce festival, ils sont fiers d’y participer. Pas simplement parce qu’il apporte de la visibilité (dont ils n’ont pas tellement besoin), ni parce qu’il donne un coup de fouet à la vie culturelle après des mois au ralenti, mais surtout parce qu’inviter des humoristes et les placer sur une scène partagée avec des artistes zouglous, c’est laisser la possibilité de pointer du doigt ce qui ne va pas dans la société. « L’État accepte d’être critiqué, et c’est intéressant », illustre Digbeu. « Être invité ici, ça signifie qu’on estime que tu as ton mot à dire », confirme Gohou.

Rire de tout, même (et surtout ?) en ce moment

« On peut rire de tout. L’humoriste est un voyant, un visionnaire, un observateur : il peut s’exprimer à propos de tout, même de la guerre qu’on a connue, ça passe bien », assure Gohou. Mais qu’en est-il de la pandémie dans laquelle sont plongés le pays, le continent, le monde entier depuis un an et demi ? « On ne va pas laisser cette merde nous foutre en l’air ! » s’exclame Digbeu, qui reconnaît quand même qu’à titre personnel il a parfois trouvé la situation décourageante. Mais hors de question d’éviter de traiter la pandémie, surtout dans la mesure où le sujet concerne tout le monde.

LES HUMORISTES SONT VENUS COMBLER CE VIDE ENTRE INJONCTIONS THÉORIQUES ET RÉALITÉ PRATIQUE

Dans ce contexte, les humoristes sont essentiels pour faire circuler certains messages, qui passent mieux avec du rire et des personnalités aimées du public : « En Afrique, comme les gens n’ont pas l’habitude de se laver tout le temps les mains, il était important d’expliquer qu’après avoir touché un truc il fallait se nettoyer… Se laver les mains toutes les cinq minutes quand on travaille dans le désert et que l’on n’a pas l’eau courante, ça n’a aucun sens », illustre Digbeu. L’humour a selon lui permis à la fois de diffuser la consigne, de l’expliquer et de la justifier.

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